Nous avons précédemment expliqué comment notre système de reporting en temps réel peut clore l’écart de TVA et réduire la fraude sans collecter les données de facturation des entreprises. Notre mécanisme partage des similarités avec les systèmes de reporting en temps réel (i.e. au fil de l’eau) préexistants, qui sont en voie de se généraliser dans l’Union européenne (UE). Nous sommes en faveur de cette augmentation car nous sommes convaincus que le reporting a fait ses preuves en tant qu’excellent outil pour réduire l’écart de TVA. Notre système offre des avantages complémentaires en matière de confidentialité pour les entreprises et les gouvernements en mobilisant la cryptographie moderne. Cependant, nous pensons que les solutions existantes ne devraient pas être remplacées immédiatement car elles sont une avancée en matière de lutte contre la fraude. Dans cet article, nous démontrerons comment ses systèmes préexistants peuvent facilement interagir avec notre solution en instaurant un référentiel commun de reporting pour les transactions intracommunautaires.
Les systèmes de reporting dans l’UE
Ces dernières années, certains États membres se sont tournés vers des systèmes de reporting en temps réel pour réduire l’écart de TVA. Le recours au reporting en temps réel a démontré d’excellents résultats par le passé. Par exemple, plusieurs pays d’Amérique latine ont réussi à réduire leur écart de TVA de 50 % grâce à un système de reporting[1]. De plus, si implémenté de la bonne façon, les entreprises peuvent aussi tirer parti de ses mécanismes étant donné que cela peut permettre l’automatisation de certains processus.
Des pays comme la Hongrie, l’Italie et l’Espagne se sont démarqués dans la lutte contre les 140 milliards d’euros de fraude à la TVA en implémentant leurs systèmes de reporting. Les résultats préliminaires sont encourageants. En Italie, le temps de détection des fraudes est passé de 18 à 3 mois[2]. Au vu des résultats chez ses voisins, la France a également décidé d’implémenter l’obligation de recours à la facturation électronique entre entreprises, combiné à un système de reporting au plus tôt en 2023[3]. Le gouvernement est toujours en train d’étudier l’aspect pratique de la mise en œuvre, et c’est précisément là que réside la difficulté. Tous les pays implémentent leur système de reporting différemment en ayant des standards différents. Certains requièrent la facturation électronique, tandis que d’autres requièrent des entreprises de transmettre leur comptabilité entière.
Cela complexifie la conformité des entreprises qui opèrent dans plusieurs pays de l’UE. Il faut aussi penser à la difficulté de la tâche pour les contrôleurs financiers lorsqu’ils doivent effectuer l’audit de l’ensemble d’une comptabilité répartie dans plusieurs États membres. Ainsi, la Commission européenne s’intéresse désormais aux possibilités des systèmes de reporting et aux processus d’unification des différents systèmes. Afin d’atteindre cet objectif, la Commission « présentera une proposition législative visant à moderniser les obligations de transmission de données de facturation » d’ici 2022/2023, comme il l’est indiqué dans « Paquet en faveur d’une fiscalité équitable et simplifiée » publié en juillet 2020. La Commission européenne veut s’assurer d’un « échange d’informations renforcé, rapide et possiblement en temps réel sur la TVA des transactions intracommunautaires », et dans le même temps, la Commission veut uniformiser « les mécanismes pouvant être appliqués aux transactions domestiques »[4].
Cette anticipation de la Commission européenne est nécessaire car, dans les années à venir, l’implémentation de systèmes de reporting va se répandre en Europe. Ci-après, nous allons conceptualiser les modalités de mise en œuvre de cette uniformisation et d’interopérabilité d’un système de TVA européen.
Comment garantir une interopérabilité européenne ?
Pour garantir une interopérabilité européenne, le moyen le plus direct serait de parvenir à un accord intra-européen sur les standards de reporting à adopter entre États membres. Cependant, étant donné qu’il y a une tendance persistante des États membres à implémenter de tels systèmes individuellement, cela sera extrêmement compliqué d’adopter un accord intra-européen. Néanmoins, il existe d’autres moyens d’avancer. TX++ est le procédé le plus sécurisé pour implémenter un système de reporting. Il peut être utilisé non seulement par les pays n’ayant pas encore de système de reporting, mais peut aussi s’incorporer aux systèmes de reporting préexistants. Pour que différents systèmes puissent interopérer, il est nécessaire d’établir un référentiel commun de reporting pour les transactions intracommunautaires. L’histoire de l’Union européenne démontre qu’elle a la capacité de construire des ponts entre les cultures et mécanismes, ce référentiel commun ne serait que la continuité de cette tradition. En plus de créer un système interopérable de TVA européenne, des avantages additionnels pour les entreprises résulteraient de ce référentiel commun. Comment cela marche t’il en pratique ?
Si un État membre, ayant un système de reporting performant, utilise le référentiel commun, il serait immédiatement en capacité d’échanger des données avec les autres États selon les spécificités de TX++. De plus, cela permettrait aux entreprises opérant sur le plan international et aux contrôleurs financiers de demander l’accès aux données du registre de l’identification fiscale via un format de données uniforme. Les changements d’infrastructures informatiques seraient relativement moindres étant donné que les données actuellement rapportées à l’administration peuvent être transposées sur TX++. Non seulement cela renforcerait le marché unique de l’Union européenne, mais cela se traduirait également par des avantages directs pour les entreprises.
Nous pouvons assurer que même les entreprises ne se sentant pas concernées par le caractère confidentiel de TX++ peuvent réutiliser les données qu’elles ont rapporté à l’administration fiscale à un niveau européen. C’est un atout unique que TX++ offre aux entreprises afin d’attester, à des parties tierces, qu’elles ont effectivement transmis leurs données de facturation auprès de l’administration fiscale. En revanche, cela ne veut pas dire que les informations sont publiquement accessibles : le propriétaire des données doit consentir à ce qu’une partie tierce puisse accéder aux données. Si une entreprise décide de partager ses données avec une tierce partie, comme par exemple un cabinet d’audit, le cabinet d’audit pourrait alors croiser les registres comptables de leurs clients avec la base de données TX++ en effectuant simplement une vérification croisée des empreintes numériques chiffrées (découvrez comment les données sont chiffrées en intégralité ici). De plus, cela pourrait permettre aux entreprises de démontrer qu’elles ont bien généré des revenues supérieur à certains seuils, ou bien de donner aux investisseurs un accès en temps réel à la comptabilité afin de les informer des performances de l’entreprise. Mobiliser ses données financières vérifiées peut aider les entreprises dans une multitude de situations.
TX++ : un système de reporting confidentiel
Étant donné que notre objectif principal est de réduire l’écart de TVA, nous supportons les initiatives de reporting préexistantes. Et pourtant, nous essayons impétueusement de démontrer aux États membres n’ayant pas encore adopté de solution de reporting de TVA que TX++ offre de nombreux avantages pour les administrations fiscales et les entreprises. Nous avons précédemment expliqué les bénéfices que les entreprises peuvent tirer de la réutilisation des données chiffrées rapportées via TX++, mais elles peuvent aussi tirer partie du chiffrement en lui-même. Comme aucune information de facturation n’est conservée, aucune de ses précieuses données ne peut être exposée. Ainsi, les entreprises n’ont pas à s’inquiéter que leurs informations de tarification deviennent publiquement disponibles. Si les informations de tarification venaient à être exposées, cela pourrait avoir des conséquences dramatiques sur la relation client-fournisseur étant donné que les entreprises adaptent généralement leurs prix à leurs différents clients. Par ailleurs, cela peut également avoir des conséquences sur l’entièreté de l’économie européenne. Si les informations de tarification d’une entreprise européenne venaient à être divulguées à une entreprise non-européenne, cette dernière pourrait tout simplement offrir des tarifs en deçà des tarifs proposés par l’entreprise européenne et la dépasser.
Une raison supplémentaire en faveur de l’implémentation d’un système de reporting de TVA confidentiel est que les failles de sécurité ont un coût élevé, comme nous l’avons expliqué dans notre article, Le prix à payer pour une faille de sécurité. Afin d’atteindre nos objectifs en termes de confidentialité et sécurité, nous mobilisons la cryptographie moderne. Cela nous permet de détecter les tentatives de fraude sans avoir besoin de consulter les données présentes sur les factures, et de rendre quasi-impossible les fuites de données. Après la détection d’une tentative de fraude, l’administration fiscale peut demander à consulter les données présentes sur les factures ciblées, similairement à un audit, au propriétaire des factures car il est le seul à avoir la clé pour déchiffrer les données. Ses données étant horodatées et enregistrées dans le système, il est impossible de la modifier à posteriori.
Conclusion
Avec le soutien de nombreux experts en TVA, nous observons une tendance au sein des États membres à implémenter des mécanismes de reporting afin de réduire l’écart de TVA. Les solutions implémentées récemment par les États membres montrent des résultats prometteurs. Par conséquent, la Commission européenne étudie elle-aussi les possibilités vis-à-vis des systèmes de reporting, essentiellement pour uniformiser les systèmes existants et à venir. Nous espérons pouvoir soutenir la Commission dans ses efforts en permettant aux pays ne souhaitant pas implémenter TX++ de se raccorder à notre système grâce au référentiel commun. Non seulement cela créerait un système interopérable, mais en plus, cela apporterait des avantages complémentaires aux entreprises, tels que la possibilité de réutiliser les données rapportées comme par exemple pour les audits.
[1] (En anglais) Bruno Kosh (2019) ‘The e-invoicing journey 2019-2025’, Billentis, disponible en ligne : < https://www.billentis.com/The_einvoicing_journey_2019-2025.pdf >
[2] (En anglais) European Commission ‘Council implementing decision amending Implement Decision (EU) 2017/784 authorising the Italian Republic to apply a special measure derogating from Articles 206 and 226 of Directive 2006/112/EC on the common system of value added tax’, 22 juin 2020, p.3 disponible en ligne : < https://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/1/2020/EN/COM-2020-242-F1-EN-MAIN-PART-1.PDF >
[3] (En anglais) Pagero ‘Mandatory e-invoicing in France: implementation dates and potential models’, dernière mise à jour le 16 janvier 2020, disponible en ligne : < https://www.pagero.com/news/mandatory-e-invoicing-france/ >
[4] (Traduit de l’anglais) European Commission ‘Communication from the Commission to the European Parliament and the Council an action plan for fair and simple taxation supporting the recovery strategy’, 15 juillet 2020, p.9 para. 4, disponible en ligne : < https://ec.europa.eu/taxation_customs/sites/taxation/files/2020_tax_package_tax_action_plan_en.pdf >